Réplique (Les enquêtes de Lizzy Gardner t. 1) (French Edition) (36 page)

BOOK: Réplique (Les enquêtes de Lizzy Gardner t. 1) (French Edition)
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Le regard de Brittany passa avec hésitation de Samuel Jones à
Lizzy.

— Maintenant, dit Lizzy, appelle ta mère. Elle a besoin d’entendre ta
voix.

Brittany hocha la tête avant de disparaître par la porte que Jared venait à peine de
franchir.

Lizzy gardait le pistolet braqué sur Samuel Jones. Il ne méritait pas le surnom de Spiderman. Il n’avait rien d’un super-héros. C’était un tueur, un homme dépourvu de
conscience.

Samuel Jones leva la
tête.

Avant qu’elle ne comprenne ce qu’il faisait, il s’était mis debout, délogeant aisément la colonne de son
support.

— Reste où tu es, dit-elle, les doigts tremblants, en dirigeant l’arme vers sa
poitrine.

Il avait beau avoir les mains menottées derrière le dos, il était désormais libre de se déplacer. Il était déjà gravement blessé avant même que Jared ne lui tire dessus, et pourtant il tenait toujours sur ses
pieds.

— Tu as toujours été trop gentille, dit-il en voyant qu’elle n’ouvrait pas le
feu.

— Reste où tu es, sinon je
tire.

— Pourquoi as-tu menti ? demanda-t-il.

— Parce que je voulais
vivre.

Elle recula d’un pas vers la
porte.

— Pourquoi as-tu tué ces
filles ?

— Je te l’ai dit. Elles représentaient une menace pour la
société.

— C’était des enfants. Ce n’est pas facile d’être une adolescente. Tu n’as rendu service à personne. Tu n’es pas un héros,
Sam.

Il fit un pas dans sa direction. C’est alors qu’elle aperçut sa chère araignée qui remontait le long du col amidonné de sa chemise à boutons imbibée de sang. La bestiole avait dû l’escalader quand il était assis par terre, menotté à la colonne de
lit.

— Je te préviens. Un pas de plus et je
tire.

— Je connais tes pires peurs. Je sais tout de toi. J’avais tellement de projets pour toi. Tu n’as pas
idée.

— Tu es un homme malade et répugnant. Et tu ne me connais pas du
tout.

— Je te connais mieux que personne, Lizzy. Et je sais que tu ne m’abattras pas, dit-il. Ils peuvent bien me mettre derrière les barreaux, mais ce n’est pas terminé. Je te le
promets.

Il avança d’un pas. L’araignée disparut à l’intérieur de sa
chemise.

— Donne-moi ton arme,
Lizzy.

— Je n’aurai peut-être pas à te tirer dessus, après tout, lui dit-elle. Pas si ton amie australienne dégaine la
première.

Il comprit ce qu’elle sous-entendait et regarda autour de lui sans trop savoir si elle disait la vérité ou pas. Troublé, il pivota et s’arrêta net. Leurs regards se croisèrent et Lizzy comprit qu’il venait de se faire mordre. Il grimaça. Puis, sous le choc, ses yeux s’écarquillèrent d’effroi, peut-être même de
douleur.

Il avait raison sur un point, songea Lizzy. Elle n’était pas certaine qu’elle lui aurait tiré dessus. Ce n’était pourtant pas l’envie qui lui manquait. Elle avait senti la gâchette sous son doigt, froide et implacable, mais elle n’avait pas pu se résoudre à le tuer. Elle se demandait s’il avait toujours vu aussi juste à son
sujet.

Lizzy le regarda se démener pour trouver l’araignée, ce qui n’était pas une tâche aisée avec les mains jointes dans le dos. Elle espérait que c’était la dernière fois qu’elle voyait Samuel Jones. Il n’avait pas une allure de tueur en série. Il n’avait même pas une allure de tueur. Il semblait normal, comme un passant que l’on croiserait dans la rue sans le remarquer. Un homme que le hasard avait rendu méchant. Un homme qui vivait et travaillait au sein de leur communauté et qui avait, à lui seul, ôté la vie d’un si grand nombre de jeunes filles… des filles qui méritaient d’avoir la chance de grandir, de gagner en maturité… des filles qui auraient tiré des leçons de leurs erreurs et auraient marqué le monde par leur simple
présence.

Chaque partie du corps de Samuel Jones se mit à trembler, y compris sa langue. Ce n’était pas beau à voir. De la salive coulait sur sa lèvre inférieure et une sueur luisante lui recouvrit le
front.

— À l’aide, dit-il en tombant à
genoux.

Mais Lizzy avait déjà quitté la
pièce.

CHAPITRE 38

Sacramento,
Californie

Dimanche 21 mars
2010

 

— Mary était ma sœur et ma meilleure amie, déclarait Jessica devant la foule, composée de sa famille et de ses amis, ainsi que d’une majorité d’étrangers, des personnes qui faisaient partie de la communauté depuis des
décennies.

Tous voulaient voir Mary trouver le repos, pour pouvoir à leur tour avancer, avec l’assurance que leurs enfants étaient en sécurité à présent que Samuel Jones était
mort.

— C’était le genre d’amie que tout le monde devrait avoir. Mary et moi, nous aimions jouer sur les balançoires du parc en élaborant des projets d’avenir grandioses. Nous allions voyager, apprendre d’autres langues et explorer le monde ensemble. Il n’y avait rien que nous ne puissions faire. Nous avions toute la vie devant
nous.

Elle marqua une pause pour écraser une
larme.

— Malheureusement, Mary nous a été enlevée trop tôt, à ma famille et moi. Mais ne soyons pas tristes. Pas aujourd’hui. Mary n’aurait pas voulu nous voir tristes. C’était la personne la plus joyeuse que j’aie jamais connue. Regardez autour de vous, dit Jessica en ouvrant grand les bras. C’est une belle journée de mars et nous sommes ici pour célébrer la vie de Mary. Je me souviendrai de son sourire, de son rire et de ses rêves. Je vais retourner à l’école, apprendre une nouvelle langue et obtenir mon diplôme. Ensuite, je voyagerai et explorerai le monde. Et partout où j’irai, Mary sera à mes côtés, parce que je la porterai dans mon cœur et je ne l’oublierai jamais.
Jamais.

Lizzy était debout au premier rang. Le regard de Jessica se posa sur elle et Lizzy sourit à sa nouvelle amie. Elle était reconnaissante envers Jimmy et son équipe d’avoir retrouvé le corps de Mary avec celui des trois autres filles enterrées dans le jardin de Samuel
Jones.

La semaine passée, Jared s’était entretenu avec l’adjoint du doyen responsable des études de premier cycle au CSU et, une fois qu’il lui eut exposé la situation de Jessica, le doyen avait accepté de lui donner une autre chance. Elle retournerait à l’école en
automne.

Le service de commémoration se déroulait en extérieur, au Sierra Hills Memorial Park, sur Greenback Lane, à Sacramento. L’air était chaud pour cette période de l’année et le ciel d’un bleu profond, moucheté de quelques touches d’ivoire. Des chênes centenaires et des sycomores de vingt mètres de haut se dressaient sur les trente hectares de collines
vallonnées.

Pour cette occasion, observa Lizzy, la communauté de Sacramento s’était regroupée. Des gens avaient témoigné leur compassion en faisant des dons généreux à la fondation Mary Crawford, permettant ainsi à Jessica et à sa famille d’offrir à Mary des funérailles
convenables.

Le nom de Samuel Jones ne serait pas prononcé aujourd’hui. Deux jours après la mort de Samuel Jones, sa sœur aînée, Karen Crowley, avait fini par raconter son histoire. Le jeune Samuel Jones avait été torturé par les amies de sa sœur, dont deux étaient mortes depuis, dans des circonstances singulières. Après le départ en vacances des parents de Karen, qui l’avaient laissée s’occuper seule de son petit frère, elle s’était soûlée en compagnie de ses amies, avait fumé de l’herbe et sniffé de la cocaïne. Comme Sam avait menacé d’appeler leurs parents, les amies de Karen l’avaient emmené dans le sous-sol, où elles l’avaient attaché sur une chaise avec du ruban adhésif, lui avaient bandé les yeux et la bouche à grand renfort de scotch, et l’avaient brûlé avec des cigarettes. Mais Karen n’avait pas pris conscience de ce qu’elles avaient fait avant de décrocher le téléphone, trois jours plus tard, pour appeler l’ami de son frère, chez lequel elle le croyait caché. Lorsque Karen avait enfin retrouvé Sam, il était mal en point. Sur le sol, attaché à la chaise, il avait été piqué par une veuve noire. Karen l’avait compris en découvrant l’araignée morte serrée dans son petit poing. Malgré le remords évident que Karen Crowley avait exprimé, elle n’avait jamais cherché à lui nuire volontairement. Elle avait été relâchée et était déjà rentrée en Europe, auprès de sa
famille.

Lizzy remarqua Hayley à l’écart. Hayley la salua d’un geste de sa main bandée et Lizzy la rejoignit. Quatre semaines s’étaient écoulées depuis que Jared avait volé à leur secours. Hayley avait des marques de brûlure sur les bras, les jambes, le cou et le visage. À l’instar de Brittany, ses cheveux avaient été coupés de manière irrégulière, et Lizzy lui avait offert une séance chez le coiffeur, dont elle était sortie avec une nouvelle coupe courte effilée sur le côté et une longue frange en biais. Hayley n’était pas le genre d’adolescente qui aimait les effusions, mais Lizzy s’en moquait. Elle passa le bras autour de sa taille et la serra longuement contre
elle.

Cathy avait proposé à Hayley d’habiter chez elle, pour la remercier d’avoir protégé Brittany. Hayley avait fini par accepter, non sans
effort.

— Comment es-tu venue ? demanda
Lizzy.

— Ta sœur m’a prêté sa
voiture.

— Ouah, elle doit vraiment t’aimer.

Hayley sourit, mais sa voix était triste lorsqu’elle
dit :

— J’avoue que je me suis un peu emballée, non ? Me faire attraper par ce fou et le laisser prendre le dessus. Je croyais sincèrement pouvoir le
vaincre.

— Tu n’aurais jamais dû te mettre en danger, Hayley, mais tu as bien agi. Tu as vraiment bien
agi.

— Ta nièce aussi. C’est une dure à cuire, tu sais, pour une pom-pom
girl.

Lizzy hocha la tête. Elle ne pouvait s’empêcher de penser à la fierté de Cathy quand elle lui avait appris que Brittany s’en sortait très bien à l’école et qu’elle avait intégré l’équipe des pom-pom girls. Il avait fallu dix-neuf points pour recoudre le côté de son visage, mais ses blessures cicatrisaient proprement et les médecins prévoyaient qu’il ne lui resterait presque plus aucune trace à la fin de l’année.

Cathy avait emmené Brittany consulter Linda Gates, pour qu’elle puisse se confier sur ce qui s’était passé ainsi que sur la récente séparation de ses parents. Avec le soutien que tout le monde lui apportait, Lizzy ne doutait pas que Brittany parviendrait à avancer et mener une vie normale et
saine.

Hayley agita la main vers Jared, qui venait de se garer. Il arrivait en retard, après s’être arrêté à l’hôpital pour rendre visite à Jimmy. Jimmy passait des tests, suite à la découverte de son
cancer.

Jared était particulièrement beau dans son costume cravate
sombre.

— Tu vas épouser ce gars ? demanda
Hayley.

— Non, je ne crois
pas.

Lizzy inclina la tête pour mieux le
regarder.

— Et puis, il ne me l’a pas
proposé.

Elles échangèrent des sourires entendus avant que Lizzy ne s’empresse de changer de
sujet.

— Je me demandais si cela t’intéresserait de faire la tournée des écoles du pays. Ensemble, nous pourrions enseigner aux enfants comment se défendre contre les dangers du
monde.

— On dirait une mission de super-héros, fit
Hayley.


 Exactement.

Hayley se frotta la main, que comprimait un épais
bandage.

— Je ne sais pas. Je ne suis pas aussi courageuse que je veux bien le
prétendre.

Lizzy
soupira.

— Moi non
plus.

— J’ai vraiment eu
peur.

— J’ai toujours
peur.

— Je vais y réfléchir, dit enfin Hayley, avant de montrer sa main bandée. Mais j’ai bien peur de ne jamais pouvoir rejouer du
piano.

Lizzy parut
atterrée.

— Tu joues du
piano ?

Les yeux de Hayley
pétillèrent.

— Non. C’est pour te
chambrer.

Lizzy secoua la tête. Décidément, cette fille avait un humour
décalé.

— Pour la première fois de ma vie, dit Hayley d’un ton sérieux, j’ai pris conscience que je voulais vivre. Ce n’est pas fou ? Je suis torturée par un psychopathe, et j’ai soudain envie de
vivre !

Elle
souffla.

— Ça n’a aucun
sens.

— Non, acquiesça Lizzy. Mais après tout, c’est plutôt bien si toutes les mauvaises choses nous permettent de mieux ressentir les
bonnes.

— Oui, j’imagine, dit-elle, tandis que Jared s’approchait.

Ils discutèrent ensemble pendant un moment, avant que Hayley ne prenne congé et se dirige vers le
parking.

— C’est une dure, confia Lizzy à Jared, tandis qu’ils la regardaient s’éloigner.

— Oui, tu l’as dit. Désolé d’être en retard, ajouta-t-il. On dirait bien que j’ai raté l’éloge de
Jessica.

— Elle comprendra. Elle a fait un super boulot. Comment va
Jimmy ?

— Il commence la chimio dès demain matin. Le pronostic est
incertain.

— Quel dommage. J’aime bien Jimmy. Et même si je ne l’aimais pas, je ne souhaiterais le cancer à
personne.

— Je lui ai dit que nous passerions à l’hôpital dans la
soirée.

Lizzy hocha la tête et ils balayèrent la foule du regard à la recherche de Jessica. Elle savait que Jared traversait des moments difficiles. Jimmy était son ami et son mentor, et il était gravement malade. Et puis, il y avait les parents de Jared et leur mariage raté. Même s’il n’avait pas beaucoup évoqué leur séparation, elle avait vu que cela lui pesait. Jared avait beau être adulte, Lizzy était bien placée pour savoir les effets qu’un divorce pouvait avoir et à quel point cela permettait de réfléchir et porter un regard différent sur votre
vie.

Ils s’arrêtèrent en retrait de la tombe de Mary, où Jessica et son frère déposaient des fleurs. Ils les laissaient se recueillir dans l’intimité.

— J’ai du mal à croire que tout soit enfin terminé, avoua Lizzy à
Jared.

Jared prit sa main dans la
sienne.

— Ce n’est que le début Lizzy. Que le début.

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